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06.03.2016 - par Alexis Tsipras,

Président du Comité central de SYRIZA et Premier ministre de la Grèce.

(extraits de son discours au Comité central).

Nous assistons au déplacement le plus massif de populations depuis la 2e Guerre Mondiale.

C’est pour la première fois que le monde occidental ressent les conséquences des choix insensés faits dans la région fragile du Moyen Orient, des conséquences qui, cette fois-ci, ne se limitent pas à déstabiliser cette région-là, mais touchent au cœur de l’Europe. Par le passé, des interventions insensées, le concours à des conflits impérialistes, l’incitation à des conflits armés, la dissolution d’États structurés, constitués, avait comme conséquence de déstabiliser ces États-là ou leur région. Maintenant, pour la première fois l’Occident et l’Europe se rendent compte que les résultats de leurs choix ne concernent pas uniquement cette région fragile, mais atteignent le noyau de l’UE et de l’Europe.

D’une Europe qui, face à cette crise, montre ses grandes faiblesses :

  • le déficit de solidarité ;
  • le déficit d’analyse politique et de processus permettant la prise et la mise en œuvre de décisions en temps utile ;
  • mais surtout le déficit politique.

L’Europe aujourd’hui est en crise de nerfs, non pas parce qu’elle ne peut pas supporter les conséquences de la vague des flux migratoires, ni parce qu’elle n’est pas capable d’intégrer dans son tissu social les réfugiés de la Syrie, mais à cause de sa propre faiblesse politique.

C’est parce que tout au long de ces années passées les politiques d’austérité ont nourri ce monstre de l’extrême droite, qui a trouvé un terreau fertile pour croître surtout dans les pays de l’Europe centrale, de l’Est, mais aussi du Sud, sans épargner notre propre pays.

En effet, la décision cruciale – quand le dilemme se posait entre approfondissement et élargissement et les dés ont été jetés pour l’élargissement – la décision déterminante d’élargir l’UE vers des pays de l’ancien bloc de l’Est s’est avérée une décision à haut risque.

L’extrême droite n’est plus une force d’opposition dans les États membres, elle entre aux gouvernements et l’Europe de 28 se trouve obligée aujourd’hui à coopérer avec des gouvernements ayant un discours et une orientation populistes et d’extrême droite.

Ce donc que la crise migratoire met aujourd’hui à l’évidence est avant tout la question de l’hégémonie politique, l’hégémonie des idées. Qui est-ce qui va l’emporter ?

  • L’Europe de la peur et du racisme ?
  • ou l’Europe de la solidarité et du multiculturalisme ?

Voilà l’enjeu crucial.

Et c’est l’issue de ce conflit d’idées et politique qui déterminera l’avenir de l’Europe et modifiera éventuellement la structure de l’Europe pour de longues années à venir.

Il est donc clair que la façon dont l’Union euro-péenne gérera désormais la crise économique et la crise migratoire déterminera non seulement sa forme et son orientation politique, mais son existence même.

Parce que l’Europe aujourd’hui s’écrase entre l’austérité et les frontières fermées.

Elle tient ses frontières ouvertes à l’austérité, alors qu’elle les ferme aux gens qui, chassés par la guerre, cherchent l’espoir et une bouée de sauvetage.

Bien sûr, lorsqu’il s’agit de réfugiés, la souveraineté nationale prime sur les règles européennes communes ; par contre, lorsqu’il s’agit de l’économie et de son choix dominant, celui de l’austérité, la souveraineté et a démocratie sont jetées à la poubelle.

Il s’agit là d’une contradiction fondamentale qui fragilise le fondement moral de l’intégration européenne et la cohésion de l’Europe elle-même ; d’une contradiction qui est alimentée par les politiques dominantes de l’Union européenne.

Elles prouvent que le catalyseur de l’euroscepticisme est le néolibéralisme ; c’est bien le néolibéralisme, et pas les forces qui résistent aux effets du néolibéralisme.

Le repli national face à la question migratoire, ce sont les politiques d’austérité qui l’ont provoqué. Ce sont ces mêmes politiques qui ont suscité chez un nombre de pays des réactions du genre « pour tout ce qui est loin de chez moi, loin de ma cour, que ceux qui en sont concernés se débrouillent seuls ».

En tant que pays situé à l’avant-garde, le peuple grec en premier lieu, mais aussi l’État – les habitants des îles de premier accueil en particulier – ont mis en évidence le visage humain de l’Europe, ont fait preuve d’humanité et de solidarité.

Ils ont donné de la substance aux valeurs qui sont les nôtres, qui sont les valeurs d’une Europe démocratique.

Nous poursuivrons le même chemin. Nous continuerons à sauver des vies, à offrir de la nourriture et de la sécurité à des gens persécutés, chassés, traqués.

Traduction : Vassilis Sklias

SYRIZA Luxembourg

syrizalux@gmail.com

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